28 mars 2017 : petit-déjeuner du Club de l’Audace avec Bruno LAFONT, Co-Président de LafargeHolcim

Bruno LAFONT est intervenu dans le cadre du Club de l’Audace sur le sujet « Le climat, l’urbanisation et les nouvelles technologies ». Ces trois enjeux sont stratégiques. Ils imposent une profonde transformation du monde qui doit mobiliser non seulement les gouvernements mais également tous les acteurs de la société civile. Ils impliquent des ruptures, un changement radical des priorités et une autre manière de vivre.

Le Climat :
Le climat est un enjeu crucial, car c’est un phénomène mondial. On ne peut pas se contenter de prendre des mesures uniquement à l’échelle nationale. Le changement climatique est un sujet qui divise le monde. Nous avons d’un côté les pays développés (ayant plus de facilité à réduire les émissions de CO2 compte tenu du ralentissement de la croissance et de la production) et les pays émergents (connaissant une forte croissance et employant beaucoup de matières premières à forte émission de CO2).

Le climat a donné lieu à un accord mondial qui a vu le jour lors de la COP21. Si les objectifs sont clairs, il reste à mettre en œuvre des actions concrètes selon un planning précis. A ce jour, la signature de l’accord sur le climat a eu un impact direct sur les entreprises qui l’ont intégré dans leurs stratégies respectives.

L’enjeu concerne la mise en place de la transformation. Comment mener à bien une transformation dans le contexte politico-économique actuel ?
Le cas emblématique du ciment en est un exemple par excellence, car le ciment est une matière dont la production engendre de fortes émissions de CO2 par son processus de fabrication et qui consomme beaucoup d’énergie. Le groupe Lafarge a dû réfléchir sur la stratégie à mettre en place en tenant compte de son empreinte écologique.

Cette transformation passe par plusieurs étapes, la première étant la prise de conscience de l’empreinte écologique. Puis, il est impératif dans un second temps de déterminer les indicateurs qui permettront de mesurer son empreinte écologique. Il faut ensuite réfléchir aux actions à mener pour réduire les émissions de CO2 et savoir en mesurer les résultats. Enfin il faut être capable d’entraîner les autres acteurs du secteur dans la même direction. LafargeHolcim a beaucoup investi en matière de R&D pour réduire ses émissions. La technologie a permis de réduire de 25% ses émissions de CO2 durant ces 15 dernières années, ce qui en soit est un progrès très important. Pour obtenir ces résultats, il a fallu une volonté à la tête de l’entreprise, de la R&D ainsi que des signaux clairs en matière de régulation. Certaines questions sont complexes à résoudre. Comment rester compétitifs ? Comment mettre en place les mêmes process partout dans le monde afin de réduire les émissions de CO2 de manière homogène ?

Le changement climatique est également lié aux énergies, notamment l’usage du charbon qui est un des premiers facteurs de pollution dans le monde.Pour autant, un pays comme l’Inde ne peut pas travailler sans charbon aujourd’hui. En raison des écarts de niveaux économiques dans les différents pays du monde, la lutte contre le changement climatique demeure une tâche difficile. Faire évoluer le mix énergétique est complexe dans la mesure où toute évolution engendre des transferts de capitaux massifs au sein d’une entreprise. Afin de réussir la transformation, il est impératif de faire changer les comportements et donc de miser sur l’éducation et la formation de la population.

Le numérique :
Si les citoyens voient mal l’impact du changement climatique sur leur vie de tous les jours, ils voient bien l’impact du numérique. Si les choses évoluent très rapidement en matière de numérique depuis 5 ans (alors même que cela fait 20 ans qu’on en parle), des évolutions majeures sont encore à venir. On ne mesure pas précisément l’impact du numérique pour les citoyens et les entreprises. Le premier impact consiste à séparer les personnes qui sont dedans et celles qui n’y sont pas. Le second impact est lié à l’emploi. Certains estiment que 40% des emplois seraient menacés par le numérique, sachant que de nouveaux emplois seront créés. On espère un solde négatif limité à environ 10% en matière de création d’emplois.
Dans les entreprises, toutes les fonctions sont concernés : des chaînes de production jusqu’à la relation avec le client, …

L’urbanisation :
50% de la population mondiale vit actuellement dans les villes. Demain ce sera 70%, sachant que les grandes villes de demain n’existent pas encore et vont naitre d’ici 2050 en Inde, en Chine et en Afrique. Les pays émergents sont en train de prendre le dessus sur les pays industrialisés en matière d’urbanisation. Ils réfléchissent activement à ce que sera la ville de demain. Toutes les villes sont créées pour des raisons économiques. L’objectif est de faire des villes assez denses où les transports sont bien développés. Aujourd’hui, le moteur économique c’est la ville, car les villes attirent les entreprises, sont créatrices d’emplois, …
La France doit relever le défi d’avoir en 2050 une métropole de niveau mondial. Chaque métropole devrait être reliée à la mer. On ne peut plus penser notre pays à travers ses 38.000 villages.

A propos de Bruno LAFONT :

Après avoir fait HEC et l’ENA, Bruno LAFONT a commencé sa carrière chez Lafarge en 1983 en tant qu’auditeur interne à la Direction financière. Il a ensuite intégré l’activité sanitaire du groupe en tant que Directeur administratif et financier en Allemagne. Entre 1986 et 1988, il a été Directeur financier de cette branche puis de 1988 à 1989, directeur du développement international, basé en Allemagne. En 1990, Bruno LAFONT est nommé Directeur des opérations Ciment, Granulats & Béton de Lafarge pour la Turquie et la région Méditerranée Orientale. En 1995, il rejoint le Comité exécutif de Lafarge comme Directeur général adjoint Finances, puis devient en 1998 Président de l’activité Plâtre. Entre 2003 et 2005, il est Directeur Général délégué du Groupe. Administrateur de Lafarge SA depuis 2005, il occupe la fonction de Directeur Général de Lafarge à partir de janvier 2006 et lance le plan stratégique « Excellence 2008 » visant à faire du Groupe le meilleur de son secteur. En 2006, deux opérations stratégiques sont menées : le rachat des intérêts minoritaires de Lafarge North America et la cession de l’activité Toiture. Il devient Président-Directeur général du Groupe en 2007. En 2008, il annonce l’acquisition d’Orascom Cement, leader cimentier du Moyen-Orient et du Bassin méditerranéen, qui marque une accélération décisive du développement du Groupe dans les marchés émergents à forte croissance. En 2015, après la fusion Lafarge-Holcim il devient Coprésident du nouveau groupe LafargeHolcim.