L’action politique, ce passage pour quitter les causes d’iniquité

Bernard DEVERTUn lecteur de mon blog me fait part en des termes amicaux, ce dont je lui sais gré, de sa désapprobation quant à mes prises de position favorables à l’APL et à la loi Solidarité et Renouvellement Urbains (SRU), Habitat et humanisme devant, me dit-il, rester à distance du politique.
Le Pape François vient à mon secours. Dans son message vidéo adressé aux participants d’une rencontre tenue à Bogota ces 1er et 3 décembre, il demande aux Chrétiens de s’engager dans la Cité, rappelant que la politique est une des formes les plus élevées de la caritas.
Le cœur n’est pas un sentiment mais un appel à un discernement pour changer et faire changer ce qui doit l’être afin de mettre un terme au plus vite aux situations inacceptables. Le sujet n’est pas de dénoncer mais d’engager des actions transformatrices, et pas seulement réparatrices. Quand le corps social est malade, il faut trouver les remèdes pour le guérir ; les soins ne sauraient relever du palliatif.
Ne point intervenir auprès des politiques sur la loi SRU, c’est consentir à des villes marquées par les discriminations, plus grave des ghettoïsations.
Dans la métropole phocéenne, le PLU ne prévoit l’application de la loi SRU que pour les opérations supérieures à 120 logements, d’où la difficulté de créer un habitat diversifié, alors qu’à Nice – qui n’est pas la ville réputée la plus sociale – le dispositif s’applique aux petits programmes, facilitant l’ouverture de logements à des prix maîtrisés. Conséquence pour notre association : 60 nouveaux logements diffus d’insertion à Nice en 2017, aucun sur Marseille.
Comme elles sont belles, dit le Pape François, les villes qui dépassent la méfiance malsaine et qui intègrent ceux qui sont différents et qui font de cette intégration un nouveau facteur de développement !
Au sujet de l’APL, Habitat et Humanisme loge par vocation des personnes ou familles dont le reste à vivre (après imputation du loyer et charges, assurance, électricité, frais de transports) est souvent inférieur à 100 € mensuels. Une survie !
Qui n’a pas entendu : 5€ de minoration d’APL, ce n’est rien ! Seulement, c’est beaucoup pour ceux qui n’ont rien.
La crise du logement dure depuis trop longtemps pour ne pas reconnaître la nécessité d’effectuer des réformes, via un meilleur équilibre entre aide à la personne et aide à la pierre. Le changement, oui, s’il n’aggrave pas la situation des plus fragiles. Demander aux gouvernants de veiller à cette exigence, c’est faire de la politique pour que justice et amour s’embrassent.
La politique est un service. Encore faut-il la servir. La question n’est pas de savoir si nous sommes de droite ou de gauche, mais de se demander si nous sommes à côté, où aux côtés, de ceux qui souffrent.
Trop de personnes victimes de la pauvreté se trouvent dans un angle mort et s’y tiennent, refusant d’être considérés comme une charge. Au nom de la fraternité, qui n’existe que là où il y a de l’équité, les subsides devraient être entendus comme une entraide, mieux un investissement de la Nation, facilitant l’autonomie des blessés de la vie. Attention, cette conception du bien commun s’éloigne.
S’exprimer et agir au sein de la cité, c’est répondre à la question du Livre de l’humanité : qu’as-tu fait de ton frère ? Loin d’être passif, l’appel conduit à reconnaître que l’oraison est un problème politique, pour reprendre le titre du petit opuscule du Jésuite, Jean Daniélou, ouvrant grand les frontières.
La res publica n’a nul besoin de censeurs et de Ponce Pilate mais d’acteurs qui, dans la Cité, prennent le risque d’initier ou soutenir les réformes pour un mieux vivre-ensemble.

Soyez audacieux, exprimez votre point de vue !

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